14

 

Plus ébranlée qu’elle ne voulait l’admettre, Eve entra le lendemain matin dans le bureau du Dr Mira. Elle s’assit, veillant à croiser les bras pour ne pas trahir ses émotions.

— Avez-vous eu le temps d’établir le profil, docteur ?

— Vous aviez invoqué le statut d’urgence. Mira avait passé une nuit blanche à compulser des rapports et ses propres diagnostics psychiatriques.

— J’aurais aimé avoir davantage de temps, mais je peux déjà vous donner une vision d’ensemble.

Eve se pencha en avant avec intérêt.

— Qui est-il, docteur ?

— En général, ce genre de crime n’est pas commis par une femme. C’est un homme d’une intelligence supérieure à la moyenne, asocial et voyeur. Il est audacieux, mais n’aime pas prendre de risques, même s’il n’en est pas conscient.

D’un geste gracieux, le médecin croisa ses longs doigts effilés.

— Ses crimes sont mûrement réfléchis. Il tire son plaisir de la sélection de ses victimes, de la préparation et l’exécution de ses plans, le sexe ne jouant qu’un rôle secondaire.

— Dans ce cas, pourquoi des prostituées ?       — De même que la mort signifie le contrôle suprême sur autrui, le sexe implique une maîtrise de l’autre. Nous avons affaire à un homme qui a besoin d’imposer son pouvoir. Il annonce à l’avance le nombre de ses victimes afin de montrer à quel point il est organisé, méticuleux, ambitieux.

— Est-il possible qu’il ait eu ses six victimes en tête dès le début ?

— Le seul dénominateur commun à ces trois femmes est leur profession. A mon avis, il les a choisies au hasard, expliqua le médecin avec gravité. Quoi qu’il en soit, il éprouve un profond mépris des femmes. Il humilie et avilie ses victimes après leur mort afin de montrer son dégoût et son sentiment de supériorité. Et je peux vous dire qu’il savoure ses actes, lieutenant. C’est un homme très dangereux parce qu’il se juge très habile et son succès le renforce dans son opinion.

— Il s’arrêtera à six, tout au moins avec cette méthode, répondit Eve, les sourcils froncés. Notre homme est trop vaniteux pour se dédire auprès des autorités. Mais il est probable qu’il continue ses crimes par un autre moyen. Ce petit jeu l’amuse trop pour qu’il l’abandonne.

— On dirait que vous avez déjà lu mon rapport, fit remarquer le Dr Mira avec un demi- sourire.

Rassemblant son courage, Eve se décida à poser la question qui l’avait harcelée durant toute la nuit.

— A votre avis, docteur Mira... commença-t-elle avec circonspection, pour brouiller les cartes et se protéger, serait-il susceptible de se créer un alibi et de charger quelqu’un d’autre d’agir à sa place ?

— Non, répondit le médecin avec compassion, devinant un profond soulagement dans les yeux d’Eve. A mon avis, il ne peut se satisfaire d’un meurtre par procuration. Il lui faut être présent, tout comme il se délecte de vous voir vous démener, lieutenant. C’est pour cela qu’il glisse ses disquettes directement sous votre porte, à votre propre domicile.

— Il a expédié la dernière. Je l’ai trouvée dans mon courrier ce matin, postée d’une boîte du centre-ville, environ une heure après le meurtre. Il se doutait que mon immeuble était sous surveillance. Quoi qu’il en soit, j’apprécie beaucoup votre promptitude, docteur, conclut Eve qui se leva et lui tendit la main.

— Mon rapport comporte un addendum, lieutenant. Cette arme laissée sur le lieu du dernier crime... J’ai la conviction qu’il voulait impliquer quelqu’un d’autre afin non seulement de brouiller les cartes, mais surtout de vous toucher personnellement, voire de vous blesser. Je dois vous dire que je suis très préoccupée par l’intérêt qu’il vous porte.

— Rassurez-vous, répondit Eve avec détermination, je vais mettre tout en œuvre pour que ce soit lui qui ait tout à redouter de l’intérêt que je lui porte. Merci beaucoup, docteur.

 

Eve se rendit directement au bureau de Whitney. Avec un peu de chance, Feeney aurait déjà vérifié ses soupçons sur l’acquisition de l’arme. Si elle avait raison, et elle en avait l’intime conviction, le profil psychologique de Mira innocenterait Connors.

A son regard glacial et indifférent lors de leur dernière communication, elle se doutait déjà que ses obligations professionnelles avaient détruit la relation qu’ils avaient commencé à bâtir. Eve vit ses craintes confirmées dès qu’elle pénétra dans le bureau de son supérieur et y trouva Connors. Il se contenta d’incliner la tête sans un mot quand elle tendit le dossier à Whitney.

— Le profil établi par le Dr Mira, commandant.

— Merci, Dallas. Le lieutenant va vous conduire en salle d’interrogatoire, dit-il à Connors. Nous apprécions votre coopération.

Toujours sans un mot, Connors se leva et attendit qu’Eve lui ouvre la porte.

— Vous avez droit à l’assistance d’un avocat, dit-elle, mal à l’aise, en appuyant sur le bouton de l’ascenseur.

— Je sais. Suis-je sous le coup d’une inculpation, lieutenant ? demanda sèchement Connors qui monta à sa suite dans l’ascenseur.

— Non, il s’agit de la procédure habituelle. Il s’enferma à nouveau dans un mutisme obstiné jusqu’à ce qu’Eve explose.

— Bon sang, je n’ai pas eu le choix ! s’exclama-t-elle, au supplice. Je ne fais que mon métier.

Il la précéda lorsque les portes se rouvrirent.

— Ah bon ?

Quand ils pénétrèrent dans la salle grise et impersonnelle, les caméras de surveillance dissimulées dans les murs se déclenchèrent. Eve s’assit à une petite table et invita Connors à prendre place en face d’elle.

— Cette procédure est enregistrée. Vous me comprenez ?

— Parfaitement.

— Lieutenant Dallas, identité 5347BQ. Sujet : Connors. Le sujet a décliné la présence d’un avocat. Est-ce correct ?

— Oui, le sujet a décliné la présence d’un avocat, répéta Connors avec un agacement non dissimulé.

— Connaissiez-vous une compagne accréditée dénommée Georgie Castle ?

— Non.

— Vous êtes-vous rendu au 156, 89e Rue Ouest ?

— Non.

— Possédez-vous un Ruger P-90, arme de combat automatique remontant environ à 2005 ?

— C’est possible. Je dois vérifier. Dans l’intervalle, disons que oui.

L’estomac noué, Eve hésita avant de poser la question fatidique.

— Auriez-vous acheté ladite arme à Sotheby lors d’une vente aux enchères en octobre dernier ?

— Je l’ignore, répondit Connors, les sourcils froncés. Il m’arrive d’acheter des pièces aux enchères mais, vu l’importance de ma collection, je n’ai pas en tête tous les détails de mes acquisitions.

Il consulta son agenda électronique de poche.

— Non, aucun achat à Sotheby en octobre. Il me semble qu’à cette période je me trouvais en voyage d’affaires au Japon. Ma secrétaire pourra vous le confirmer.

Ce n’est pas une preuve, Connors, et tu le sais, songea Eve, en proie à un profond désarroi.

— Dans les ventes aux enchères, il est souvent fait appel à des commanditaires, objecta-t-elle d’une voix qu’elle espérait posée.

Connors la dévisagea sans émotion apparente et rangea son agenda.

— Si vous vérifiez auprès de Sotheby, on vous répondra que je ne fais jamais appel à un commanditaire. Quand je décide d’acquérir une pièce, c’est parce que je l’ai vue de mes propres yeux. Et j’ai l’habitude de faire mes offres moi-même. Pour une raison ou pour une autre, ce qui avait suscité mon intérêt peut soudain perdre son attrait, conclut-il avec un regard lourd de sens.

L’allusion n’échappa pas à Eve. La mort dans l’âme, elle s’efforça de se résoudre à l’irréparable.

— L’arme en question a servi à abattre Georgie Castle à environ dix-neuf heures trente hier soir.

— Vous et moi savons pertinemment que je n’étais pas à New York hier soir. Vous avez sûrement vérifié la transmission, se défendit Connors en la dévisageant d’un regard d’acier.

Par obligation professionnelle, Eve s’abstint de répondre.

— Votre arme a été trouvée sur le lieu du crime.

— Comment savez-vous qu’elle m’appartient ?

— Qui a accès à votre collection ?

— Je suis le seul à posséder le code.

— Les codes peuvent être violés, insista Eve, au supplice.

Ne comprenait-il donc pas qu’elle le suppliait de toute son âme de lui fournir une porte de sortie ?

— Improbable, mais possible, approuva-t-il avec son flegme coutumier. Mais sans mes empreintes digitales, l’ouverture d’une vitrine déclenche une alarme. La porte est automatiquement condamnée et mon service de sécurité aussitôt prévenu. Je peux vous l’assurer, lieutenant, le système est infaillible. Je sais protéger ce qui m’appartient.

Au même instant, Feeney entra. Il fit signe à Eve de le suivre à l’extérieur.

— Tu avais raison, Dallas, dit-il en fourrant ses mains dans ses poches dès que la porte fut refermée. Offre par informatique, transaction en liquide, livrée à un dépôt électronique. D’après le directeur de Sotheby, c’est une procédure inhabituelle pour Connors. En général, il assiste en personne aux ventes, parfois par vidéocom. Depuis quinze ans qu’il est en affaires avec la maison, jamais il n’a fait d’offre par informatique.

Eve s’accorda un soupir de satisfaction.

— Cela corrobore sa déclaration. Quoi d’autre ?

— J’ai approfondi mes recherches sur le Ruger P-90. En fait, il n’est apparu que la semaine dernière au nom de Connors dans le fichier des déclarations. Le commandant ordonne de laisser tomber pour l’instant.

Eve soupira de soulagement. Mais elle ne pouvait se permettre de se réjouir trop tôt. Elle se contenta de hocher la tête.

— Merci, Feeney, dit-elle en rentrant dans la salle d’interrogatoire.

— Vous pouvez y aller, Connors, lui annonça-t-elle sur le seuil.

Perplexe, il se leva lentement, tandis qu’Eve s’effaçait pour le laisser passer.

— En quel honneur ?

— Nous n’avons aucune raison de vous importuner plus longtemps.

Connors referma la porte d’un coup sec et foudroya Eve du regard.

— Importuner ? répéta-t-il d’un ton sarcastique. Me soupçonner de meurtre ! Me contraindre à abandonner des réunions capitales à des milliers de kilomètres de la Terre pour me cuisiner dans vos bureaux ! Vous osez appeler ça importuner ?

Eve comprenait sa colère et son amertume. Mais elle était obligée de faire son travail.

— Trois femmes sont décédées, répondit- elle avec calme. Nous devons explorer toutes les pistes.

— Et vous me soupçonnez ? s’exclama-t-il en l’agrippant par sa chemise avec une violence qui la déconcerta. Après ce qui s’est passé entre nous ?

— Je suis policier. Je ne peux négliger aucune hypothèse.

— Et si la balance avait penché de l’autre côté, vous m’auriez incarcéré sans aucun scrupule, n’est-ce pas ?

Il resserra encore son emprise.

— Lâchez-moi ! protesta Eve, les yeux étincelants de colère.

A cet instant, Feeney arriva au bout du couloir. Il se précipita à la rescousse.

— Lâchez-la, bon Dieu !

— Laisse tomber, Feeney !

Ignorant l’injonction de sa collègue, Feeney repoussa Connors et s’interposa entre eux.

— Laissez-la tranquille ! Elle a pris le risque de perdre son poste pour vous défendre et Simpson s’apprête à la sacrifier parce qu’elle a eu la bêtise de coucher avec vous !

— Tais-toi !

— Mais il doit...

— J’ai dit : tais-toi ! explosa Eve, exaspérée. Dans un suprême effort de volonté, elle repritson sang-froid et fixa sur Connors un regard qu’elle espérait indifférent.

— Nous avons apprécié votre coopération, dit-elle d’une voix neutre.

Puis elle tourna les talons et s’éloigna à grands pas décidés.

Connors avança sur Feeney d’un air menaçant.

— Que vouliez-vous dire ?

Celui-ci laissa échapper un ricanement méprisant.

— J’ai mieux à faire que de perdre mon temps avec vous.

Connors le poussa sans ménagement contre le mur.

— Vous allez pouvoir m’inculper de voies de fait sur agent de la force publique d’ici deux secondes, Feeney. Que vouliez-vous dire à propos de Simpson ?

— Vous tenez à le savoir ? Très bien, venez dans mon bureau.

Eve n’avait pas encore pu se résoudre à confier le chat à la fille de Georgie. Elle trouvait un peu de réconfort dans la présence de ce gros matou attachant. Pelotonnée sur son canapé, le chat blotti contre ses genoux, elle soupira, exaspérée, quand le bip de son vidéocom retentit. Sa mauvaise humeur s’amplifia lorsqu’elle reconnut Connors à l’écran. Elle décida de ne pas répondre.

Quelques secondes plus tard, le cliquetis de la serrure de la porte d’entrée la fit bondir du canapé.

— Tu es vraiment ignoble ! s’exclama-t-elle, suffoquée, tandis que Connors entrait dans le salon. Cette fois, tu dépasses les bornes !

— Pourquoi ne m’as-tu rien dit ? se contenta- t-il de demander en rangeant son passe électronique dans sa poche.

— Sors de chez moi ! Je ne veux plus te voir ! cria-t-elle, furieuse du désespoir qui perçait dans sa voix.

Loin d’obéir, Connors continua d’approcher.

— Je t’en prie, Eve, écoute-moi. L’idée qu’on puisse se servir de moi pour te blesser me révolte.

— Sois tranquille, tu y parviens déjà très bien tout seul !

— Tu m’as accusé de meurtre. Qu’imaginais-tu donc ? Que j’allais rester de marbre ?

— Je n’ai jamais cru à ta culpabilité, répondit-elle avec une conviction passionnée. Jamais... Mais dans mon métier, il n’y a pas de place pour les sentiments personnels. Et maintenant, sors d’ici !

Eve se dirigea d’un pas résolu vers la porte. Quand Connors tenta de l’arrêter, elle fit une brusque volte-face. Il ne tenta pas de parer au coup. Avec un calme imperturbable, il essuya d’un revers de main le sang qui perlait à la commissure de ses lèvres.

— Vas-y, défoule-toi, l’encouragea-t-il, tandis qu’elle restait plantée devant lui avec défi. N’aie pas peur, je n’ai pas pour habitude de frapper les femmes, et encore moins de les assassiner.

Craignant de laisser transparaître sa détresse, Eve se détourna et agrippa le dossier du canapé.

— Laisse-moi seule, insista-t-elle d’une voix égale, malgré l’émotion qui l’étreignait.

— Ne pouvais-tu pas me dire que tu avais confiance en moi ? insista Connors, ému qu’elle pût le bouleverser à ce point.

— Non, répondit-elle, refoulant les larmes qui lui piquaient les yeux. Ne comprends-tu pas que, si Whitney avait douté de mon objectivité, j’aurais eu les mains liées ? Quant à Simpson, il se serait empressé de me retirer l’affaire.

— Je n’y avais pas pensé, avoua Connors d’un ton radouci.

Il posa une main sur sa nuque, mais Eve se dégagea d’un mouvement d’épaule. Elle pivota vers lui, les yeux étincelants de colère.

— Je t’avais dit de venir accompagné d’un avocat. Sans l’efficacité de Feeney et le profil psychiatrique qui te disculpe, tu serais derrière les barreaux à l’heure qu’il est !

— Pourtant je n’ai pas eu besoin d’avocat. Seulement de toi.

Une lassitude incommensurable envahit Eve.

— Tu n’es pas encore complètement innocenté, mais les diagnostics du Dr Mira valent de l’or. Au Central et au bureau du procureur général, personne ne les conteste jamais.

— Je n’imaginais pas que tu t’étais autant démenée pour moi, Eve. Je suis terriblement désolé. Quand je t’ai appelée l’autre soir, j’ai bien vu que tu étais tracassée. Feeney vient de m’expliquer pourquoi.

— De quoi se mêle-t-il... ? s’insurgea Eve. Connors l’enserra dans ses bras.

— Il n’en aurait pas eu besoin si tu t’étais confiée à moi.

— Qu’attendais-tu donc ? Que je vienne pleurer dans ton giron ? Que je t’appelle au secours ?

— Si tu t’étais trompée à mon sujet, tu pouvais dire adieu à ton insigne. Merci d’avoir pris autant de risques, Eve.

Il lui embrassa le front, puis ses lèvres effleurèrent sa tempe, descendirent sur sa joue avec une lenteur calculée. Cette fois, Eve ne se déroba pas. Elle accueillit ses baisers avec un frémissement qui la parcourut de la tête aux pieds.

— Je vais veiller sur toi ce soir, murmura-t-il dans le creux de sa nuque. Je veux m’assurer que tu te reposes. Peut-être l’amour est-il un bon sédatif...

Avec tendresse, il souleva Eve dans ses bras.  — Voyons si nous allons trouver la bonne posologie.

Lieutenant Eve Dallas - 01 - Au commencement du crime
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